Le premier constructeur américain de voitures, qui se porte
fort bien, va fermer des usines et supprimer 14 000 emplois dans le monde.
Wall Street a apprécié. Et l’exemple est clair de la politique du
capitalisme financier.
Le lundi 26 novembre, General Motors (GM) a annoncé le
licenciement de 15 % de son personnel dans le monde et la fermeture de
cinq usines automobiles en Amérique du Nord (plus deux autres dans des pays non
révélés). L’objectif : économiser six milliards de dollars d’ici à 2020.
Le groupe a enregistré un bénéfice net de 2,53 milliards de dollars au
troisième trimestre, contre une perte nette de 2,98 milliards à la même
période en 2017. Les investisseurs ont réagi à la suppression de ces
14000 emplois en faisant grimper de près de 8 % le cours de l’action
du groupe, juste après la publication du communiqué.
La juxtaposition d’ouvriers sur le carreau et
d’investisseurs aux anges souligne un point clé de l’économie américaine :
ce qui est bon pour le bénéfice des entreprises ne l’est pas pour les
travailleurs. Les intérêts du personnel et des actionnaires
sont contradictoires. Tiens, Marx avait raison !
The Washington Post publie un graphique éloquent :
“C’est la première
fois que les bénéfices dans le privé dépassent les salaires de façon aussi
marquée et aussi durable”
Les deux courbes du graphique représentent deux façons de
gagner de l’argent au sein de l’économie américaine. Adoptons la perspective de
General Motors : la ligne grise correspond aux gens qui travaillent pour
gagner un salaire; la ligne rouge représente les actionnaires et les
investisseurs qui possèdent General Motors, ceux qui engrangent
les profits.
Entre 1947 et 2003, être sur une ligne ou l’autre
n’avait pas vraiment d’importance : on pouvait s’attendre à ce que les
revenus augmentent au même rythme, qu’on tire son argent d’un emploi à GM ou de
parts du capital de GM. Mais depuis le début des années 2000, c’est une tout
autre histoire. L’économie américaine récompense les actionnaires bien plus
généreusement que les travailleurs
Pourtant les ouvriers sont devenus beaucoup plus productifs,
contribuant ainsi de plus en plus au résultat des entreprises, mais ces
dernières ne partagent pas leurs bénéfices avec les employés, qui en sont
pourtant à l’origine. La syndicalisation continue de décliner, ce qui empêche
les travailleurs de négocier des conditions plus favorables. Et alors que le
coût des soins de santé est en augmentation, les entreprises font de plus en
plus reposer ce fardeau sur les salariés.
En France le médecin Pierre Gallois rappelle, dans une
tribune au « Monde », qu’il serait juste que l’âge de départ en
retraite soit fixé à partir des données socio-économiques dont dispose l’Etat :
« Il faut tenir compte de la différence d’espérance de vie entre cadres et
ouvriers pour déterminer l’âge de la retraite ».