En octobre 2015 au Millennium Stadium de Cardiff, le XV de
France était pulvérisé (62-13) par la Nouvelle-Zélande en quart de finale de
Coupe du monde. Le 10 décembre 2015 j’écrivais dans ce blog : La Nouvelle-Zélande se distingue par sa
formation ainsi que le « sérieux bagage technique » exigé pour
devenir rugbyman dans ce pays, et ce dès le plus jeune âge. Au programme, un
gros travail sur les « skills », à
savoir les fondamentaux tels que les passes, le jeu au pied ou les
contacts, ces gestes techniques individuels à maîtriser absolument pour pouvoir
ensuite jouer en équipe. Autre particularité, des catégories de poids à l'intérieur des catégories d'âge. Un
système « unique au monde » mis en place pour ne pas dissuader les
jeunes joueurs d'origine européenne face à leurs homologues polynésiens, dont
la maturité physique arrive plus tôt. « Cela explique également pourquoi
les Néo-Zélandais ont toujours été obligés
de travailler leur technique individuelle et les un-contre-un pour espérer
faire la différence » résume Ian Borthwick, grand reporter à L'Equipe.
Ainsi «On ne distingue plus les avants des arrières sur le plan du
déplacement et de la gestuelle, ajoute Villepreux. Leurs gestes sont
innovants, ils osent les tenter, surtout quand c'est difficile car ils ont
confiance dans leur collectif. Pour eux, manquer un geste n'est pas une erreur».
Deux ans plus tard, les All Blacks ont atomisé ce mois de
septembre l'Afrique du sud (57-0) dans le Rugby Championship, tournoi des
quatre nations de l'hémisphère Sud.
Si la formation est l’élément important, comme dans la vie,
ce qui caractérise le jeu des Blacks pourrait servir à nos entraîneurs de Top14,
s’ils ont envie d’évoluer !
Plusieurs techniciens de notre rugby, ont analysé la
« tactico-technique » du jeu néo-zélandais actuel. Ils relèvent qu’il
y a un renouvellement de l'effectif et les évolutions tactiques sont plus
simples à mettre en pratique grâce à la formation unifiée :
Olivier Magne, ex-coach des Bleuets, immergé au sein de la
province des Crusaders, raconte comment l'excellence du jeu néo-zélandais se
prépare à l'entraînement. Préparation physique et exercices techniques, en
intensité de match et toujours avec le ballon
«Le travail physique s'effectue sur le terrain à haute
intensité, dans les conditions d'efforts les plus proches d'un match. Voire
parfois plus dures... Ils travaillent sur des séquences de courses, et toujours
avec ballon, de deux à trois minutes, et à fond, afin de s'accoutumer à cette
intensité. Plus étonnant, pendant les séances de musculation, par exemple,
quand les muscles sont engorgés, ils enchaînent très vite des situations de jeu
face à une défense raisonnée afin d'être capables de réagir même en état de
fatigue extrême.» «Ils ont un ballon
dans les mains tous les jours, voire quasiment un ballon par joueur sur le
terrain. Tous les exercices sont ludiques, ce qui permet d'expérimenter les
gestes qui semblent farfelus. A l'arrivée, en match, on s'aperçoit que ce n'est
pas superflu. Bien sûr, il y a du déchet à l'entraînement, mais ça ne les gêne
pas, et il se réduit au fur et à mesure des exercices. Surtout, ils cherchent
en permanence le geste juste dans des registres qui ne sont pas académiques. En
fait, ils travaillent tout ce qui semble être hors du commun, ils expérimentent
beaucoup à l'entraînement.»
Par la pratique prioritaire du jeu debout, et un rugby
d'évitement, de recherche des espaces, la percussion et les « petits
tas » deviennent plus souvent des « accidents de jeu » comme le disait
déjà Villepreux, il y a quelques années.
Il y a là matière à réfléchir, mais tout ceci n’est pas
nouveau, la facilité d’obtenir « un résultat » étant plus souvent
utilisée dans nos contrées, la percussion-démolition plus simple à réaliser
(fonction simplement du poids-vitesse au choc),
sera encore longtemps utilisée. L’enseignement sportif, comme
l’enseignement général, techniques demandant efforts intellectuels et efforts
physiques n’est plus notre fort.