lundi 7 décembre 2015

Réfugiés de première et de deuxième catégorie. (partie 2)



Ceux qui arrivent à Ceuta et Melilla, enclaves espagnoles situées à la pointe nord du Maroc,  ont eux aussi besoin de la solidarité de tous, estime La Voz de Almería. Evidemment ce n’est pas en France que les médias rapporteront, en titre, ce genre de propos. Pourtant les allemands vont plus loin. Le Frankfurter
Allgemeine Zeitung rapporte qu’Angela Merkel a été largement applaudies pour ses déclarations [lors de sa conférence de presse du 31 août] sur la question des réfugiés qui avaient des allures de discours à un peuple inquiet : éloge des vertus allemandes, mémoire des difficultés surmontées en commun, appel à un effort national. Un pays fort comme l’Allemagne, assurait la chancelière à ses citoyens, surmontera aussi le problème des vagues de migrants que l’on voit aujourd’hui déferler. Même discours chez le Président de RFA, Gauck et peu d’opposition, lorsqu’il exhorte « encore plus d’Allemands à se défaire de l’idée d’une nation homogène, quasi à cent pour cent de langue maternelle allemande, majoritairement chrétienne et de peau claire ». Il est temps, affirme Gauck, de “redéfinir la nation comme communauté de la diversité, liée par une base commune de valeurs”. Les discours français sont bien différents. Pays des droits de l’homme, pourtant ! mais pays faible selon les critères d’Angela.

Réfugiés de première et de deuxième catégorie.
La guerre en Syrie dure malheureusement depuis plus de quatre ans et le flot de citoyens qui tentent de fuir à l’étranger ne tarit pas. Loin d’être pour eux un doux rêve, l’émigration est une question de survie. Ici, à seulement 180  kilomètres de nous, se dresse aussi une clôture, une frontière, que tentent de franchir des migrants de différentes nationalités fuyant la guerre, la répression, la faim, en quête d’un horizon, de n’importe quoi qui leur permette, même pas de bien vivre, mais simplement de vivre. Des êtres humains qui entrent [en Espagne] comme ils peuvent, quand ils le peuvent, et qui avant de passer la frontière, parfois après l’avoir passée, vivent mal dans des campements sans eau ni électricité, avec tout juste de quoi se nourrir. Beaucoup perdent la vie sur les barbelés, d’autres en mer, où ils sont tant à avoir fait naufrage, femmes et enfants compris.
En septembre, 48 migrants ont été sauvés alors qu’ils se trouvaient sur une embarcation de fortune à 2 kilomètres au sud de l’îlot d’Alborán, parmi lesquels 7 femmes et 2 bébés. Quelques jours plus tard, la Guardia Civil accueillait 44 migrants subsahariens sur un canot non loin de la même île : 31 hommes,
11 femmes et 3 bébés. Dix jours après, ce sont 31  personnes originaires de la même région qui ont été interceptées à 30 milles nautiques du même confetti de terre espagnole. Sur la nationalité exacte de ces migrants, nous n’en savons pas plus.
Devant les images d’enfants morts sur des plages de Turquie, de familles qui passent la frontière entre la Serbie et la Hongrie en suivant les voies de chemin de fer, de ceux qui traversent les Balkans pour atteindre le nord de l’Europe en faisant fi des barrières et des barbelés, notre solidarité se réveille, notre cœur s’ouvre, des familles proposent d’accueillir ces malheureux. Des manifestations de soutien s’organisent, des messages apparaissent sur de grands édifices, et il faut naturellement se réjouir de cet élan et du changement d’attitude des gouvernements.
Il faut s’en réjouir parce que ces images et ces destins nous bouleversent tous. Mais au-delà de ce changement d’attitude, les gouvernements ne parviennent pas à prendre des décisions, à agir, à mettre en place des solutions. Quelle est la différence entre les réfugiés syriens et ceux qui viennent d’autres pays ?
Entre ceux qui fuient la guerre et ceux qui fuient la faim et la misère ? Ceux qui s’entassent dans des camps à la frontière hongroise et ceux qui font de même dans nos provinces ?
On dirait qu’il y a des migrants de première et de deuxième catégorie, des migrants qui éveillent plus de compassion que d’autres. Les Syriens reçoivent l’aide de milliers de personnes, la sympathie à leur égard se manifeste par des rassemblements, des manifestations, des collectes financières et alimentaires ; les portes des maisons européennes leur sont ouvertes, et les supporters des matchs de foot manifestent leur soutien. Tandis que d’autres, des femmes, des enfants, des bébés venus d’autres pays, doivent survivre avec beaucoup moins. Quelle est la différence ? Qui manipule qui ? Responsables et gouvernements doivent chercher des solutions.
La solidarité doit s’exercer à l’égard de tous ceux qui fuient et qui souffrent, à Ceuta et Melilla comme à la frontière hongroise.

—Ginés Jesús Parra Córdoba dans La Voz de Almería Publié le 6 octobre

A bientôt.