Pour M. Emmanuel Macron, représentant de la
« start-up nation » : « Grâce à la télémédecine, au big
data, à l’intelligence artificielle, à la médecine 3P (prédictive,
préventive, personnalisée), la France va résoudre l’ensemble des problèmes
chroniques de son système de soins tout en devenant un leader mondial de
l’économie de la santé ». « Doubles dividendes », diraient les
membres de l’inspection générale des finances, dont est issu M. Macron.
Pour y répondre, les élites proposent plus de technologie et plus de privatisation.
Selon elles, toute crise, économique ou sanitaire, peut trouver sa solution
dans la technique. Il y a de nombreuses raisons légitimes d’en douter. D’une
part, plus un système de santé est privatisé, plus il est coûteux, l’exemple
américain le démontre de manière éclatante. D’autre part, des décennies de
recherches en sociologie et en histoire des sciences et des techniques nous ont
appris à ne pas céder au déterminisme technologique, forme de paresse
intellectuelle.
Finalement, le « trou de la Sécu » est précisément
creusé par l’Innovation Macronnienne, tandis que les moyens de la recherche publique ne cessent d’être
revus à la baisse, accentuant la dépendance du système public de soins au
capitalisme sanitaire. Par exemple : le fameux médicament contre
l’hépatite C, le sofosbuvir, coûtait à l’origine 41 000 euros pour
une cure de douze semaines. Malgré un accord entre le ministère de la santé et
le laboratoire américain qui le fabrique, son prix est encore de
28 700 euros. Autant de remèdes qui risquent de faire sauter la
banque publique qu’est la Sécu au bénéfice de laboratoires privés. Jupiter vend
du rêve ! Mais n’oublie pas pour qui il travaille.
Vous vous souvenez des quelques mesures « gilets
jaunes » lâchées début décembre 2018 par Emmanuel Macron, alors que le
pouvoir vacillait ? Presque un an après, surprise ! : alors que
le budget de la Sécu est voté (septembre) à l’assemblée, on découvre que c’est
la Sécu qui va payer 3 milliards de ces mesures ! Autrement dit, Macron se
sert dans nos salaires et de notre santé pour payer ses mesures d’urgence...
Mais il accentue les cadeaux aux actionnaires et patrons !
À des services au bord de l’implosion Agnès Buzyn propose
une enveloppe rachitique, ponctionnée sur d’autres secteurs, eux-mêmes en
difficulté. Faut-il dès lors parler de « crise » de l’hôpital ou de
« casse » — un projet visant à livrer une institution emblématique au
privé.
Les soignants ne veulent pas de rêves, mais juste pouvoir
bien soigner leurs patients. En culpabilisant les grévistes, la majorité attise
la colère et la gauche s’indigne des réquisitions de soignants par les forces
de l’ordre. Agnès Buzyn est aussi critiquée pour avoir fustigé l'attitude de
soignants mécontents qui se sont mis en arrêt maladie.
La grève des médecins, des infirmières, aides-soignantes,
agents hospitaliers, paramédicaux, du 14 novembre a surpris tout le monde par
sa puissance. Mme Buzyn, à l’instar de Macron- Delevoye sur la question des
retraites, n’a qu’un seul souci : tenter d’enfermer le personnel médical et non
médical, ses organisations syndicales, dans un pseudo dialogue « pour des états
généraux de la médecine, de la santé, des hôpitaux publics » visant à élaborer ensemble
des solutions « d’organisation et de restructuration des services » prises en
commun avec toute la communauté hospitalière. Mais la masse des manifestants et
grévistes du 14 novembre a dit autre chose, que l’on peut résumer ainsi : « Il
faut mettre un coup d’arrêt à cette casse de l’hôpital public et de son
personnel. Nous sommes médecins et hospitaliers, nous n’acceptons pas que les
gouvernements veuillent nous empêcher de soigner.» Justement ce soulèvement du
personnel hospitalier, avec les médecins hospitaliers, a pour racine les
mesures de réorganisation et de restructuration des services et des
établissements. Le personnel, tout le personnel médical et non médical, n’en
peut plus de ces réorganisations. Car à chaque réorganisation ou restructuration,
il voit ses conditions de travail empirer chaque fois un peu plus. Il le vit
tous les jours. Il le sait.
Et il constate avec les cheminots, les traminots, le
personnel enseignant, les agents des
Finances, les Pompiers, etc… que cette offensive est générale dans tous les
services publics.