dimanche 22 mars 2015

André Brink et le NON à l’apartheid.




« Antigone est la première
dans l’Histoire à avoir osé
dire : NON » (André Brink)




André Brink est né dans une famille afrikaner descendant de colons boers, arrivés en Afrique depuis trois siècles, son père était magistrat et sa mère institutrice. En 1960, le jeune étudiant sud-africain André Brink, découvre, à la Sorbonne … qu’il existe des Noirs. Il avait vécu jusque-là dans son pays natal, ne fréquentant que des Blancs, au sein d’une famille de farouches partisans de l’apartheid. C’est alors qu’il ose dire : NON, et qu’il rompt avec le régime raciste. Puis il rejoint les « Sestigers » (« Ceux des années 60 »), un groupe d’écrivains compatriotes hostiles à la ségrégation : Alan Paton, Breyten Breytenbach, Nadine Gordimer, John Coetzee.


Après L'Ambassadeur en 1964, il engage le combat par le roman en 1973, il publie Au plus noir de la nuit, qui relate les amours réciproques entre une Blanche et un acteur noir, lequel est torturé, puis condamné à mort, sous l’accusation du meurtre … de celle qu’il aime. Il fut le premier écrivain afrikaneer frappé par la censure en Afrique du Sud pour ce roman qualifié de «pornographique».
Suivent Un instant dans le vent (1976) et Rumeurs de pluie (1978), puis en 1979, Une Saison blanche et sèche est structuré autour d’une triple enquête, dans le cadre du massacre de Soweto (1976). Un jardinier noir enquête sur la disparition de son fils, qui est allé manifester. Le jeune homme mourra en prison. Puis le père disparaît à son tour : trop curieux. Il mourra sous la torture. Un professeur blanc, jusque-là partisan du gouvernement, reprend l’enquête du jardinier de son école, et l’étend aux deux morts : il est écrasé par une voiture. Un 3e enquêteur prend le relais : un journaliste, ami de l’enseignant, dont on nous laisse entendre que sa dernière heure a sonné.
Un turbulent silence, en 1982, évoque une révolte d’esclaves de 1824, puis un roman en France, Le Mur de la peste (1983) où l’on reconnaît l’influence d’Albert Camus, son auteur préféré.
États d’urgence  (1988)  puis, Un acte de terreur en 2 tomes (1991), qui est une réflexion sur le terrorisme : la bombe jetée sur un chef d’Etat épargne sa cible, et tue des innocents.
Adamastor (1993), Tout au contraire (1994), Les Imaginations du sable (1995), Le Vallon du Diable (2000), Les Droits du désir (2000). Dans Au-delà du silence (2003), voilà que les femmes s’en mêlent : elles se révoltent à leur tour, et font entendre leur voix, au-delà du silence imposé par l’oppression.
L'Insecte missionnaire, 2006, L'amour et l'oubli, 2006, La porte bleue, 2007, Dans le miroir suivi de Appassionata , 2009.
En 2007, il publie ses mémoires d’Afrikaner, sous le titre de Mes Bifurcations : il revendique ses liens avec Nelson Mandela et la bourgeoisie noire. Il critique le gouvernement tripartite, et notamment les dirigeants de l’ANC, incapables et corrompus, le tout dans un mélange de déception et de résignation.
Malgré quelques positions devenues ambiguës, André Brink est resté fidèle au combat de sa vie contre les préjugés ancestraux entretenus par le colonialisme, selon lesquels « les Noirs sont des porteurs d’eau et des coupeurs de bois » (Hendrik Verwoerd, ministre afrikaner « aux affaires indigènes », créateur de l’apartheid) ou bien « les races supérieures ont le devoir de civiliser les races inférieures » (Jules Ferry, Président du conseil, organisateur de l’expansion coloniale française).
Un grand écrivain et un grand combattant antiraciste nous a quitté le 6 février 2015, n’hésitez surtout pas à plonger dans sa littérature qui m’a, et qui vous passionnera.

A bientôt.

dimanche 1 mars 2015

Un témoignage et mise au point



Les évènements qu'on a abusivement étiquetés de 11 septembre français n'en finissent plus de faire causer la gent. On a pourtant que peu entendu déplorer que les criminels n'aient pas été pris vivants et traduits dans un procès exemplaire avec des philosophes, des sociologues, et des politiciens internationalistes. Plutôt que leur loger deux balles dans la tempe comme si on sortait... de l'automne 2011, et susciter d'autres vocations de martyres. On perd là une occasion de théoriser des sujets de société capitaux et d'éduquer les foules.
Je refuse de m'estampiller "Charlie", parce que j'ai peur de ces unanimités bêlantes (je pense donc je suis, ou bien : je suis le cortège ?) et que je les ressens en totale contradiction avec l'esprit des défunts. Des tas de gens se sont trouvés en résonance avec des journalistes qu'ils ne connaissaient pas ou dont les opinions leur auraient profondément déplu s'ils avaient compulsé le journal avant. Et comme j'ai l'esprit mal-tourné, je crois discerner dans cette immense manifestation de solidarité une pointe de satisfaction de voir arraisonnée, aplatie, banalisée une expression frondeuse.
Pour le reste, le recentrage des débats sur les caricatures de Mahomet -droit de satire ou agression à l'encontre de la population musulmane- me navrent, les remèdes éducatifs de cette société en dérive m'intéressant plus que ce qui finit par s'apparenter à une bravade de ses errements.
Au final, les excès de laïcité me débectent autant que le goût du sacré.

E.H.