jeudi 28 mars 2013

Nouvelles de ces derniers jours.



Baisser le coût du travail, refondation de l’école, ce que l’histoire retiendra

Radios, journaux télévisés et la plupart des grands quotidiens présentent l’accord interprofessionnel conclu entre la CFDT, la CFTC, la CGC et le patronat, le 11 janvier, comme étant « historique ». Cet accord « est le plus important depuis plus de trente ans », a même lancé le Premier ministre.
Historique ? Ce que l’histoire retiendra vraiment, et qui sera primordial pour la suite des évènements, c’est que ni la CGT ni FO ne l’ont signé ! C’est un véritable échec pour le gouvernement qui s’était fait fort de donner une place particulière au « dialogue social », comptant même l’inscrire dans la Constitution. Il recherchait ainsi un moyen d’intégrer les organisations syndicales dans la politique gouvernementale, les associer à une brutale remise en cause du droit du travail, au nom de la compétitivité des entreprises. C’est raté. C’est un gouvernement en crise qui, sous l’effet des exigences de l’Union Européenne et du patronat, n’a d’autre choix que d’aller de l’avant dans les contre-réformes anti-ouvrières. Cela le fragilise encore plus, d’autant plus que ce revers n’est pas isolé. Dans l’enseignement, le gouvernement est confronté au rejet quasi unanime des enseignants et des syndicats concernant son projet d’aménagement des rythmes scolaires et de « territorialisation » de l’école. Instruction bannie, contenu restreint, au profit de « la mise en confiance de l’élève, de l’apprentissage du lien social, de savoir effectuer des tris dans l’information numérique ».  « Régionalisation » des écoles (au niveau de la commune pour les écoles primaires) synonyme d’éclatement définitif de l’égalité républicaine dans le domaine des savoirs. On parle « d’acquis régionalisés » !
Sans parler des atteintes aux retraites et à la santé, qui lèsent profondément notre avenir.

Mini zoom sur … l’Allemagne
Rappelons nous en 2003, Gerhard Schröder engage l'Allemagne dans la réforme sociale la plus vaste de son histoire, pour mettre en place les réformes demandées par l’Union Européenne. Une « transformation » en profondeur du marché du travail, une « réforme » du système de santé, de la retraite et du système scolaire.

Dix ans plus tard, le pari semble réussi si l’on se place du point de vue des dirigeants de l’UE. Mais « les esprits sont divisés sur le bilan réel des réformes économiques et sociales du chancelier social-démocrate » reconnaissent les « experts » européens. Et les effets des mesures « d’appauvrissement » du peuple ne sont pas encore achevées.

Les mesures les plus emblématiques ?
La réduction de la durée des indemnités chômage de 32 à 12 mois maximum : après un an, les chômeurs touchent l'équivalent de l'aide sociale. Loi connue sous le nom de « Hartz 4 », du nom de l'ancien DRH de Volkswagen qui l’a inspirée. La flexibilité accordée aux entreprises pour « s'affranchir » des conventions collectives de branche, ou encore le développement des « minijobs », payés jusqu'à 450 euros par mois au maximum. Réduction de l'impôt sur les sociétés et abaissement de 45 à 42 % du taux maximum d'imposition sur le revenu, aujourd’hui ce taux est revenu à 45% comme en France. Huit ans plus tard, l'Allemagne a divisé par deux son taux de chômage et compte 42 millions d'actifs. Mais l'Agenda 2010 a accru les inégalités. Alors que les revenus des riches ont augmenté, ceux du bas de l'échelle ont baissé. Un exemple : les 7 millions de « minijobs » ne sont rémunérés pour la plupart qu'entre 200 et 250 euros par mois, pour une durée de travail normale (soit 17% des salariés et ce chiffre est en courbe ascendante). Souvent, l'Etat est obligé de verser un complément. En d'autres termes, l'Etat subventionne des emplois à bas salaires au bénéfice des entreprises, qui profitent d'une main-d'oeuvre bon marché. Mais cela pose la question des futures retraites de ces salariés qui n'ont pas de quoi cotiser. Enfin, le but de ces emplois peu qualifiés était que les chômeurs trouvent ensuite un emploi stable, ce qui est rarement le cas.

A six mois des élections, le SPD, qui a enregistré en 2009 le plus mauvais résultat de son histoire avec 23 % des voix, vient d'axer son programme électoral sur la justice sociale, et estime nécessaire d'apporter des corrections aux réformes, mais quelle crédibilité a-t-il ? En fait comme en Espagne ou en Grèce, plus aucune. Mais c'est aussi le cas de la CDU, dont la candidate, Angela Merkel, ne veut en aucun cas abandonner le terrain social à son adversaire. Témoin, les deux partis, qui ont dirigé ensemble le pays entre 2005 et 2009, veulent chacun introduire une forme de salaire minimal, ce qu'ils excluaient il y a encore cinq ans. Les vestes se retournent facilement.

Un sondage de décembre 2012, par Forsa, organisme allemand d’analyses statistiques, prouve l’état d’esprit des allemands dans le pays soi disant à imiter. A la question : « Avez-vous peur de l’avenir ? » la réponse NON obtient 14%, Oui un peu 24% , Oui beaucoup, 35%, Oui énormément 26%. En tout 85% des allemands ont peur de l’avenir ! Vive le « modèle » !
Des grandes entreprises (Thyssen, Deutsche Bank, Deutsche Bahn, Bosch, Siemens) sont prises dans des scandales, des problèmes de livraisons, gestion calamiteuse, corruption, fausses factures, commissions douteuses et infractions à la législation sur les cartels ou manipulation du taux d’intérêt interbancaire.
« Tout cela arrive au moment où la chancelière vend au monde entier les vertus du modèle allemand, où l’on fustige sans retenue l’économie boiteuse de certains pays d’Europe, la corruption et la mauvaise gestion d’autres nations » nous dit le Frankfurter Rundschau.
Et oui, surtout adoptez vite le « modèle allemand » avant que celui-ci soit trop mal en point.

Comme on chantait dans les années précédant la guerre de 1940 :
« …Mais, à part ça, Madame la Marquise
Tout va très bien, tout va très bien.… »
Alors que plus rien ne restait de ses biens incendiés !...

Puis vint Chypre.

Aujourd’hui la France est sommée par l’UE de réaliser ces réformes que les gouvernements précédents n’arrivaient pas à mettre en place à cause de la résistance des travailleurs. Dans les journaux, les radios, les télévisions, une horde « d’experts » se relaie pour indiquer au bon peuple ce qu’il faut penser. Et « d’experts » de droite à « experts » de gauche, il y en a pour tous les goûts, mais avec la même recette. Ceux qui ont des avis divergents ne seraient pas crédibles. Contribuons donc à combattre ces « experts » qui ne sont que de vrais manipulateurs, assujettis à cette UE. On vient de le vérifier encore plus clairement avec l’affaire de Chypre, en constatant la violence avec laquelle ils peuvent décider de frapper les peuples. Ils disent avoir décidé de casser la place financière chypriote « hypertrophiée » dans le seul but d’éviter un effondrement en chaîne du système bancaire européen... tout aussi « hypertrophié » et gangrené ! Un plan d’une brutalité inouïe, qui  dirige Chypre vers une récession sans précédent pour de nombreuses années et une progression du chômage dans « des proportions dramatiques » (Les Echos). D’ores et déjà, les 19 000 employés des deux principales banques sont menacés dans leur emploi sur une population totale de 1 150 000 habitants ! Mais, selon les Echos, « En laissant entendre que les investisseurs privés renfloueraient les banques à la place des Etats, le président de l'Eurogroupe a inquiété les marchés ».  Parole malheureuse, ou nouvelle politique de défense de la finance, hier interdite ? Les « experocrates » nous bassinent tous les jours avec l’interdiction de toucher aux investisseurs privés.  La veste se tourne facilement, mais une seule politique persiste celle de la défense du capital international.
Ils ont raison du point de vue de l’intérêt des financiers, ils ont tort du point de vue économique, c’est même une aberration. Hors la politique c’est l’art de gouverner, et gouverner c’est faire des choix. Le choix de gouverner du seul point de vue de la finance, c’est gouverner dans l’intérêt d’une minorité. Gouverner dans l’intérêt d’une minorité c’est une dictature.

Dans un récent sondage IFOP, 64% des français estiment que la lutte des classes est une réalité contre 44% en 1967 ?
Rappel : Ce que l’on a appelé une « révolution » en 1968, sous la houlette de Dany le particide (voir son nouveau livre), anti syndicaliste, a en fait été dévoyée vers une « révolution des mœurs », alors que fin mai 68 le pouvoir fut vacant par la force de la grève générale. Les dirigeants communistes offrirent alors un grand coup de main à De Gaulle.

Seule l’action conjuguée des travailleurs et des peuples d’Europe pour abattre la troïka, qui lutte pour la défense des seules exigences du capital financier international, peut nous  libérer du carcan des traités européens en imposant aux gouvernements d’annuler leurs plans.
Pas vu à la télé : A Tarragone 160 délégués de 13 pays européens réunis les 16 et 17 mars 2013 en conférence ont adopté un appel pour aider les travailleurs et les peuples d’Europe à conjuguer leurs forces dans ce sens.

A bientôt

samedi 23 mars 2013


Une  version que j'aime de la chanson fétiche de la révolution du 25 avril au Portugal dont il est question dans l'article précédent

Grândola, Vila Morena est beaucoup plus qu'une chanson. L'auteur interprète José Zeca Afonso l'a créée en mai 1964 après un concert dans la ville alentejana de Grândola. Presque dix ans après elle a servi de mot de passe à 0h30 le 25 avril 1974, dans une émission de la station Rádio Renascença  afin d’avertir les capitaines impliqués dans le soulèvement après avoir entendu, qu'avait approché le moment. Ce jour a été une révolution insolite, non sanglante et heureuse. « Aussi surréaliste que cela puisse paraître : les soldats soulevés prenaient position corps à terre sur le trottoir tandis que des enfants sans école les regardaient baissés à leur côté; un agriculteur monté sur son tracteur en croisant de bon matin la colonne rebelle de blindés chargée d'occuper le coeur de Lisbonne, s'est exclamé : “Vive l’armée ! et allez jusqu’au bout !” ». Le peuple portugais est sorti alors dans la rue et on l'a jouée, donnant un appui débordant, nécessaire et brave à la révolte. Et Grândola, la chanson-consigne inventée par Zeca Afonso pour remercier une ville pour son accueil dans un récital, fut reprise par les capitaines comme message qui s'est transformée en symbole pur de ce jour, du meilleur de l'histoire contemporaine « lusa » (portugaise).
 

dimanche 17 mars 2013

Nouvelles d’Espagne

El fracaso de la reforma laboral.

Je rentre du séjour hivernal en Espagne, et je reprends un titre du journal El Pais, relatif à plusieurs articles analysant « l’échec de la réforme du marché du travail ». C’était une des réformes de base qui doivent résoudre « la crise » européenne selon la troïka (Commission Européenne, BCE, FMI) et qui est rabachée par les « experts nationaux » à longueur de temps dans les médias.

Plus d’un an après la destruction du Code du Travail par le gouvernement PP (sur ordre de la troïka) l’étude publiée par El Pais démontre que la destruction d’emploi (qui devait diminuer et s’arrêter) ne cesse d’augmenter et que la situation ne s’améliore pas. Qui plus est, la condition des travailleurs s’est considérablement dégradée à cause de ces mesures. ‘La ciudadania rechaza hoy la reforma’, les citoyens rejettent aujourd’hui en bloc cette réforme qui les a appauvris. La crise du bâtiment, la culpabilité espagnole, expliquerait la dureté des réformes. Mais la frénésie de la construction a commencé et continué sous l’impulsion européenne. Aujourd’hui TOUS les travailleurs payent ce qui n’est pas leur erreur. Si il y a eu erreur; car certains ont bien profité de la situation. Seuls les riches (riche selon El Pais : plus de 30 millions d’euros d’actifs) les banquiers et financiers ne sont pas touchés et même voient leurs actifs progresser en moyenne de 7%.

Les travaux de plusieurs hôpitaux en construction sont arrêtés, ou certains terminés et prêts à ouvrir restent fermés faute de pouvoir débloquer l’argent public, celui-ci par ailleurs disponibles pour les banques afin de résoudre leurs problèmes de fusion. Ces banques qui « jouent » dans leur comptabilité avec les stocks de logements, gagnant de l’argent en reprenant les faillites de l’immobilier, et en recevant en même temps des fonds publics. Spéculation et jeux d’écritures qui permettent de gagner de l’argent sans rien vendre. Ces banques qui expulsent les espagnols en appliquant des lois obsolètes, les « desahucios » qui se retrouvent à la rue. Après une majorité de juges qui rendent raison aux « desahucios », aujourd’hui un arrêt de la Cour européenne va peut-être limiter ce problème. Il faut noter le silence du PP gouvernemental sur le sujet.

On peut lire pourtant dans le supplément dominical « Economie », d’El Pais, toute les semaines, des articles de Stiglitz ou Krugman, (dangereux révolutionnaires !), prix Nobel d’économie, faisant référence à Roosevelt ou Keynes, critiquant ce qu’ils appellent une politique suicidaire de l’Europe en Espagne et en général.

La colère des travailleurs.


Toutes les semaines, en Espagne, il y a des manifestations :
- contre les expulsions de logement, à l'appel du mouvement des victimes des hypothèques, avec le soutien des syndicats,
- les travailleurs, médecins, et infirmiers du système de santé contre les coupes budgétaires, ou les projets de privatisation des hôpitaux.
- les syndicats ont appelé à soutenir les manifestations prévues le 20 février contre les reformes envisagées au sein du ministère de la justice. Ils ont appelé aussi, le 23 février, â de nouvelles manifestations dans tout le pays contre la corruption et pour la régénération démocratique.

Au même moment, au Portugal, une vingtaine de manifestations rassemblaient des dizaines de milliers de travailleurs dans les principales villes du pays, à l'appel de la Confédération générale des travailleurs portugais (CGTP); contre la politique économique du gouvernementale. Le secrétaire général de la CGTP Arménio Carlos, a annoncé à la fin de la manifestation â Lisbonne que son syndicat appellerait à des manifestations et des grèves pendant tout le mois de mars. L’hymne, « Grandola Vila Morena », de la révolution des œillets (contre Salazar) refleurit et est utilisé pour interrompre les discours des dirigeants, dont celui du Premier Ministre au Parlement.

Et ailleurs …

L’Italie.

Le boomerang Monti.
Colère contre l'austérité, rejet de l'Union européenne : le message du peuple italien n'échappe à personne.
Celui qui « rassurait les marchés » Monti, ce banquier installé par les commissaires de Bruxelles à la tête de l’Italie, vient de leur être renvoyé comme un boomerang avec, inscrite sur son front, leur cote de popularité : 10 %.

La Grèce.

Souriez : L’émir du Qatar vient d’acheter six îles grecques de la mer ionienne pour la modeste somme de 8.5 millions d’euros.

"Les Grecs" trichaient, ne payaient pas d’impôts. Quels grecs ? Les armateurs (qui ne payent toujours pas), les professions libérales, les chefs d’entreprise, et les artisans et commerçants qui « s’oubliaient sur la tva et le chiffre d’affaires ». Aujourd’hui les travailleurs payent ce qui n’est pas leur dette. Les malades du cancer dans le secteur public, le cas le plus commun (dans le secteur privé il faut payer) ne sont plus soignés faute de médicaments non livrés par les grands labos. La pauvreté et la précarité touchent 30 % des enfants.

Selon une étude de l'Office statistique de l'Union européenne (Eurostat), 27 % des jeunes de moins de 18 ans sont menacés de pauvreté ou d'exclusion sociale dans l'Union européenne.
Sans surprise, l'étude démontre que plus le niveau social des parents est faible, plus le risque de pauvreté est grand pour leurs enfants. Le pays où le " risque " de pauvreté des enfants est le plus important est la Bulgarie, avec 52 %, suivi de la Roumanie (49 %), la Hongrie (40 %) et l'Irlande (38 %). En France et en Allemagne, ce risque est respectivement de l'ordre de 23 % et 20 %. Le commissaire à l'Emploi et aux Affaires sociales de l'Union européenne, Laslzo Andor, a publié une recommandation écrite dans laquelle il prône de développer, par exemple, la scolarité très tôt comme en France, pour laisser la possibilité aux femmes seules de travailler. A condition, faudrait-il ajouter. qu'elles trouvent du travail.

Rappelons qu'en Bulgarie, c'est l'ouverture à la concurrence édictée par l'Union européenne pour la culture du tabac qui a jeté des dizaines de milliers d'enfants dans les champs de tabac en lieu et place de leurs parents, pour un coût moindre, au compte des grandes entreprises internationales.

D'un côté, l'Union européenne s'alarme de la précarité des enfants, et de l'autre, elle l'organise.

Alors !...

Comme Monti, le gouvernement français a approuvé le traité d'austérité. Comme lui, il s'attaque au pouvoir d'achat, à la protection sociale en un mot "au coût dut ravail". Comme lui, il est dépendant des marchés qui financent sa dette publique. Observations pertinentes…
Assumant le reniement de leurs promesses, en quelques mois, président et ministres français continuent à vouloir porter la hache de l'austérité dans les hôpitaux, les retraites, la fonction publique, et raturer disloquer le Code du travail.

Une chose est claire : les travailleurs et la majorité de la population en Espagne, au Portugal et dans tous les pays d'Europe sont opposés aux différents plans d'austérité dictés par la troïka.
Les travailleurs et les jeunes, la majorité de la population sont disposés, comme le montrent ces grèves et manifestations, à combattre pour le retrait de ces plans.

Question :

- peut-on faire reculer les gouvernements par un carrousel de manifestations sans objectif précis ? Peut-on porter un coup d'arrêt à la politique dictée par la troïka sans oeuvrer à unifier en un seul mouvement, sur des objectifs précis, tous les travailleurs des villes et des campagnes ? Les 15, 16 et 17 mars prochains se tiendra à Tarragone une conférence ouvrière européenne. Mais on ne vous le dira pas à la télé !

A Madrid, Athènes, Lisbonne, … et donc Paris, les gouvernements, sous le joug du capital financier restent sourds aux avertissements des peuples, ils ne font que préparer pour LEUR union européenne « une chute sans fin, dans une nuit sans fond » selon les mots de Victor Hugo comparant la situation de l’époque à l’Enfer de Dante.
(Avec mes remerciements pour la réutilisation de cette conclusion)

A bientôt