mardi 21 juin 2016

Le travail tue…on le sait, le chômage encore plus.



J’ai déjà abordé le sujet (cliquez sur le titre pour relire) du travail qui tue dans un article du 27/04/2013
Et des inégalités de santé dans la région parisienne le 13/07/2015
Après une période de progrès (2ème moitié du XXème siècle) due aux législations conquises (Médecine du travail, Santé publique, rôle de l’Etat, …), on constate un dérapage considérable sur ces sujets provoqué par « les crises » du système capitaliste et le retour des inégalités. Je vais essayer ici de faire une synthèse de plusieurs études qui concordent.

Un accroissement de 1 % de chômage, c'est, selon une étude de l'OCDE publiée, il y a peu, dans la revue médicale The Lancet, 0,37 mort par cancer supplémentaire pour 100.000 habitants.
Un accroissement de 1 % des coupes dans le budget de santé (en pourcentage du PIB) est associé à 0,0053 mort de plus.
Au total, la hausse du chômage et les coupes dans le secteur de la santé consécutives à la crise financière de 2008 auraient abouti au décès de plus de 500.000 personnes dans le monde entre 2008 et 2010, résument les travaux de l'équipe coordonnée par Mihiben Maruthappu, de l'Imperial College de Londres !
Pour leurs travaux, ce groupe de chercheurs, américains et britanniques, ont utilisé des données de la Banque mondiale et de l'Organisation mondiale de la Santé dans 70 pays représentant deux milliards d'êtres humains.
«Dans les pays (EtatsUnis,…) où il n’existe pas de couverture sociale générale, l’accès aux soins dépend souvent du contrat de travail. Sans emploi, les patients sont probablement diagnostiqués tardivement et bénéficient d’un mauvais traitement ou avec retard», explique Rifat Atun, professeur à Harvard et auteur de l’étude. « Dans les pays (France,…) qui disposent de la couverture médicale universelle, l’association est moins évidente, mais seraient imputables au chômage en raison des facteurs de risques psychologiques (stress, dépression) et de la multiplication des comportements à risque (moindre qualité de l’alimentation, alcoolisme, tabagisme...).»

Et si les chercheurs précisent que leurs travaux établissent davantage une association qu'un lien de cause à effet entre crise économique et surmortalité due au cancer, il y a cependant « une corrélation chronologique » puisque les évolutions du chômage et celle de la mortalité se suivent.
Les spécialistes verront là la confirmation d'autres travaux qui montraient déjà l'impact dramatique de la situation économique sur la santé, notamment psychique, de la population.
En France, l'Inserm avait calculé, l'an dernier, que « le chômage tuerait entre 10.000 et 20.000 personnes » dans l’année.

Trotsky disait en 1940 : « le socialisme ou la barbarie ». Nous supportons toujours la barbarie d’un système économique qui tue sans commune mesure par rapport au terrorisme, mais nous n’avons même pas peur !... (Terrorisme en France : 147 morts en deux ans).

Espérance de vie et inégalités.

On entend souvent dire que l’augmentation de l’espérance de vie justifie la hausse de l’âge auquel on a droit à des prestations gouvernementales de retraite, parce qu’on en touchera bien plus longtemps. Or, les données qu’on utilise généralement pour présenter la hausse de l’espérance de vie se contentent de fournir un seul taux pour les hommes et un autre pour les femmes comme si tout le monde bénéficiait de ces taux de façon égale. Or, c’est loin d’être le cas!

Les progrès de la médecine ne peuvent plus compenser les inégalités d’accès aux soins !

Prenons le cas de l'espérance de vie aux Etats-Unis qui a fait l’objet de plusieurs études. De 1976 à 2007, l'espérance de vie des américains augmentait régulièrement. Elle décline en 2007/2008, et marque une rupture avec l'idée naïve que la toute puissance de la médecine pourrait compenser ad vitae aeternam les multiples atteintes faites à notre santé, que ce soit à cause de nos modes de vie, de la dégradation de notre environnement, mais surtout après ces études de la recrudescence des inégalités pécuniaires et d’accès aux soins.
On constate que l’espérance de vie à 40 ans entre 2001 et 2014 :
  • des femmes passe de 78,8 ans (avec une probabilité de 95 % de se situer entre 78,7 et 78,9 ans) pour celles du centile inférieur de revenus à 88,9 ans (avec une probabilité de 95 % de se situer entre 88,7 et 89.1 ans) pour celles du centile supérieur, soit un écart de 10,1 ans entre les plus pauvres et les plus riches;
  • des hommes passe de 72,7 ans (avec une probabilité de 95 % de se situer entre 72,6 et 72,9 ans) pour ceux du centile inférieur de revenus à 87,3 ans (avec une probabilité de 95 % de se situer entre 87,2 et 87.5 ans) pour ceux du centile supérieur, soit un écart de 14,6 ans entre les plus pauvres et les plus riches.
Le second constat est que les inégalités dans l’espérance de vie augmentent au même rythme que les inégalités de revenus…
Les inégalités aux Etats-Unis ne se matérialisent pas seulement sur le plan financier, mais aussi en termes d’espérance de vie selon l’endroit où l’on habite. Ainsi, quand on est pauvre, la probabilité de vivre moins vieux est plus grande si l’on habite Detroit (Michigan) ou Cincinnati (Ohio) plutôt qu’à New York ou Los Angeles (Californie). C’est la conclusion à laquelle arrivent huit chercheurs dans une étude statistique publiée lundi 11 avril, dans The Journal of the American Medical Association, qui s’est appuyée sur l’examen de 1,4 milliard de déclarations d’impôts de personnes âgées de 40 à 76 ans sur une période qui s’étale de 1999 à 2014. Elle montre d’abord que les hommes faisant partie des 1 % les plus riches vivent en moyenne quinze ans de plus que ceux appartenant à la catégorie des 1 % les moins riches (pour les femmes l’écart est ramené à dix ans). Une étude de la Brookings Institution publiée en février avait déjà mis en lumière l’aggravation de l’écart d’espérance de vie en fonction des revenus.
La situation actuelle est telle qu’un Américain de 40 ans dont les revenus sont situés dans le centile (1 pour 100) le plus bas a une espérance de vie dans certains états des EtatsUnis similaire à celle qu’on constate au Bangla Desh. En revanche quand on appartient au centile le plus haut, l’espérance de vie aux États-Unis est l’une des plus élevées au monde.
Ces résultats recoupent ceux d’une autre étude publiée en novembre 2015 par deux économistes de l’université de Princeton (New Jersey), Angus Deaton et Anne Case, qui montre que le taux de mortalité de la population blanche américaine la moins éduquée, âgée de 45 à 54 ans, a augmenté de façon inédite au cours de la dernière décennie.

Comme l’impérialisme américain impose son modèle à ses « amis », les pays occidentaux sont bel et bien confrontés à une dégradation générale de l'état de santé de leur population. Et l'avenir n'est pas rose, car tant que les autorités « oublieront » de se pencher sur les causes des maladies, celles-ci continueront de se développer.

Rappelons, une fois encore, alors que twitter et facedebouc se sont enflammés sur sa présence dans un sujet du bac (qui c’est celui là !), qu’Anatole France disait : « ''On croit mourir pour la patrie, mais on meurt pour les industriels.''… Il n'y a aucun doute que de toutes les guerres - et celle de 14 peut-être plus que les autres - le capitalisme s'en nourrit. L'industrie adore la guerre avant, pendant, après. Et j'ai pensé que si on regardait l'après-guerre, l'axe était encore plus amer plus décapant. » Et le 18 juillet 1922 dans l’Humanité : « La guerre mondiale fut essentiellement l’œuvre des hommes d’argent. Ce sont les hauts industriels des différents Etats de l’Europe qui la voulurent, la rendirent nécessaire, la firent, la prolongèrent…Ces hommes là, ils ressemblent à leurs Hauts fourneaux dont il faut sans cesse, le jour, la nuit, emplir les entrailles de minerais, de charbon, afin que ruisselle au bas la coulée de métal. Leur insatiable appétit exige qu’on jette au feu, sans relâche, dans la paix, dans la guerre, toutes les richesses du sol et tous les fruits du travail, et les hommes, oui, les hommes par troupeaux, par armées, tous précipités pêle mêle dans la fournaise béante afin que s’amassent à leur pieds les lingots, toujours plus de lingots ». Je rappellerai à ces jeunes que ce fut un Homme important et que l’école républicaine en partie détruite par la soi disant « modernisation » a, apparemment, oublié de leur en parler. Ce n’est pas un hasard du point de vue des dirigeants, il n’y a qu’à voir la manière dont ils commémorent la boucherie de Verdun.
Rappelons aussi Jean Jaurès (député socialiste, interpellation à la Chambre des députés, le 8 mars 1895) : « Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l'orage. Toujours votre société violente et chaotique, même quand elle veut la paix, même quand elle est à l'état d'apparent repos, porte en elle la guerre, comme une nuée dormante porte l'orage. (. . .) Il n'y a qu'un moyen d'abolir la guerre entre les peuples, c'est abolir la guerre économique, le désordre de la société présente ».
La guerre économique est plus hypocrite ! Quand en aurons nous assez !

A bientôt